“L’amour, ce n’est pas que pour les humains!”
Ulrich Josserand
Le contexte.
Je vivais à Cap-Chat, en Haute-Gaspésie. C’est un peu le paradis pour les photographes. On y trouve la mer, des montagnes de plus de mille mètres d’altitude, des falaises qui se jettent dans l’eau, des lacs et, surtout, une multitude d’animaux sauvages.
Il n’est pas rare d’y croiser des cerfs de Virginie ou des orignaux. Le renard se fait souvent plus discret, mais il est bien présent!
Se perdre dans la nature.
Me voici donc parti par cette douce journée de printemps pour les Chic-Chocs. Depuis Cap-Chat, la route est agréable et on ne s’en lasse pas. On commence par la route 132 jusqu’à Sainte-Anne-des-Monts. C’est le long du Saint-Laurent que ça se passe. On profite de la route pour observer les vagues et les phoques sur les rochers. Habiter dans le coin, c’est un peu être en vacances toute l’année.
Voici le temps de bifurquer sur la route 299. C’est une route unique avec des vues imprenables qui coupe la Gaspésie du nord au sud. Tout au bout, c’est la Baie-des-Chaleurs. Entre les deux, une mer de montagnes vous attend, pour les sportifs ou le plaisir des yeux.
Après être sorti de la ville de Sainte-Anne-des-Monts, c’est la forêt qui est présente. On y longe la rivière. La route sinueuse s’enfonce et le décor devient de plus en plus sauvage. On reste concentrés malgré la vue, les orignaux et les cerfs sont chez eux ici. Comme la route traverse leur salon, il arrive qu’il y en ai un qui traverse. Sans doute se rend-t-il de son salon à sa cuisine…
Puis, on profite de l’un des chemins pour s’enfoncer dans la montagne. En ce début de saison, il faut rester prudent sur ces chemins de terre. En plus des cervidés, la neige réservent quelques surprises en laissant quelques plaques ici et là, parfois assez profondes pour y rester bloqué. À d’autres endroits, l’eau des fontes des neiges recouvrent la route avec un courant parfois étonnant. Traverser à gué peut être dangereux. Surtout que ces secteurs ne sont pas couverts par le réseaux cellulaire et qu’il n’y a pas âme (humaine) qui vive.
Je garde les yeux bien ouverts, dans l’espoir de voir le roi de la forêt (orignal) ou pourquoi pas un lynx? Après tout, il m’arrive d’en croiser! Je continue d’avancer tranquillement afin de rejoindre un sentier de randonnée. Les animaux y seront peut-être plus présents sous ce soleil agréable.
“Et soudain, la magie prend vie. Je tombe immanquablement en amour”
Ulrich
Puis, à la sortie d’un virage…
C’est une courbe assez prononcée et sans visibilité. La route de terre et gravier en légère pente est bruyante. Je dois l’avouer, mon vieux 4×4, fidèle compagnon à l’époque et mort depuis, l’est tout aussi. Ça n’aide probablement pas pour voir des animaux. Je prends ce virage, respirant cet air de montagne qui me rappelle ma jeunesse. Définitivement, la montagne a une odeur.
Environ à cent mètres après la sortie, une renarde est assise en plein centre du chemin. Elle me regarde, visiblement pas inquiète et ne bouge pas. Je m’arrête pour l’observer. Je reste quelques secondes sans bouger afin d’observer son comportement. Elle est détendue et se couche. Elle semble relativement jeune et a vraiment l’air en forme. L’hiver a visiblement été clément pour elle.
La surprise n’est pas finie!
J’ouvre ma porte et descends de la voiture. En main, mon appareil photo muni d’une longue lentille 150-500mm. Elle est vieille mais efficace et solide. J’utilise de très longues focales, car je crois sincèrement qu’afin de ne pas leur nuire, il faut rester à distance des animaux sauvages. On s’entend, un renard n’est habituellement pas dangereux, mais s’habituer à l’humain pourrait sérieusement hypothéquer ses chances de survie.
Sortent alors du boisé trois renardeaux excités. De vrais bébés chiens à se courir après, se sauter dessus et se batailler. J’ai l’impression de revoir mes chiens quand ils étaient petits. Maman ne bouge pas et les observe. Elle profite surement de ce moment de repos. Élever cette petite équipe à l’air de prendre beaucoup d’énergie.
L’observation.
Je m’allonge sur la route en avant de ma voiture afin de les déranger le moins possible. Je trouve une position agréable et commence à les poser. Un renardeau qui chasse sa queue, un autre qui mort celle de son frère (ou sœur!), maman impassible… Je les regarde attendri. Ils courent, sautent, se roulent et se chamaillent. C’est beau de les voir. Il ne soucient de rien et ne sont pas conscient des dangers ni de la vie qui les attend.
J’en repère un qui semble être plus dominant. Il passera même un bon moment à m’observer, de loin, se demandant surement ce qu’est cette grosse bibitte… Je ne tarde pas à le nommer: Boss. Il semble même me toiser un peu de loin, campé bien droit sur ses quatre petites pattes, la tête droite. Je me dis que ça fait partie de son schéma d’apprentissage.
La petite équipe s’approche de leur mère à la course et lui saute dessus. Le temps est venu d’accueillir maman dans la mêlée et de se battre avec elle. Ça semble épuisant d’être une maman renarde.
“Puis, la magie opère”
Ulrich
L’amour.
Deux des petits s’éloignent continuant leur jeux. Le dernier reste auprès de maman, voici venu le temps de la tendresse. La renarde lèche le jeune, c’est beau à voir. Puis alors que je continue à prendre pleins de photo et que, je dois l’avouer, ma position commence à être inconfortable. La vie m’offre cette photo. Un moment furtif de l’amour d’une mère. Quelques secondes intenses, museau contre museau, les yeux fermés. Peut-être est-ce de l’anthropomorphisme, peut-être pas. En tout cas, je crois sincèrement à l’amour animal.
À bientôt pour d’autres histoires de photos!